samedi 19 mai 2012

Stevenson : La marche solitaire

A présent, pour se goûter convenablement, une randonnée à pied doit être faite seul. Si vous l'entreprenez en groupe, ou même à deux, elle n'a plus de la randonnée pédestre que le nom. C'est quelque chose d'autre qui se rapprocherait davantage du pique-nique. Une randonnée à pied doit se faire seul, car la liberté est essentielle; parce que vous devez être libre de vous arrêter et de continuer, et de suivre ce chemin-ci ou cet autre, au gré de votre fantaisie; et parce que vous devez marcher à votre allure, sans trotter comme un champion de la marche, ni musarder avec une fille. Et alors vous devez être accessible à toutes les impressions et laisser vos pensées prendre la couleur de ce que vous voyez. Vous devez être comme un chalumeau dont n'importe quel vent peut jouer. «Je ne vois pas l'intérêt, dit Hazlitt qu'il peut y avoir à marcher et à parler en même temps. Quand je suis à la campagne, j’ai le désir de végéter comme la campagne »- ce qui est l'essentiel de tout ce que l'on peut dire en la matière.

Il ne doit pas y avoir de caquetages près de vous, qui viennent troubler le silence méditatif de la matinée. Et tant qu'un homme raisonne, il ne peut pas s'abandonner à cette bonne ivresse salutaire qui prend naissance quand on se remue beaucoup au grand air, qui débute par une sorte d'éblouissement et de lourdeur de l'esprit et se termine dans une paix qui dépasse lentement.

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